Le pemphigus est caractérisé en Tunisie par une prédominance des formes superficielles touchant préférentiellement les femmes jeunes d’origine rurale, alors que cette maladie est rare dans la population âgée. Ce travail a pour objectif d’étudier le profil épidémio-clinique et évolutif du pemphigus du sujet âgé de plus de 60ans dans le sud tunisien.

Une étude rétrospective était menée dans le service de dermatologie de Sfax sur un période de 32ans (1983 à juin 2015). Nous avons inclus tous les patients de plus de 60ans dont le diagnostic de pemphigus était confirmé par des critères cliniques, histologiques et immunologiques.

Trente-quatre patients étaient inclus soit 14 % de l’ensemble des cas de pemphigus dans cette même période d’étude. Le ratio F/H était de 1,26. Les âges de début de la maladie variaient entre 60 et 86ans avec une moyenne de 69,5ans. Vingt-sept patients (82 %) étaient d’origine rurale. La répartition des formes superficielles et vulgaires était de 47 et 50 % respectivement. Un seul cas de pemphigus était paranéoplasique. Le délai moyen du diagnostic était de 6mois. La surface corporelle atteinte était étendue (>30 %) dans 64 % des cas. La corticothérapie par voie orale était indiquée dans 33 cas à une dose d’attaque moyenne de 1mg/kg/j. La cicatrisation était obtenue dans un délai moyen de 39jours. Un traitement de 2^e intention était nécessaire chez 11 patients (bolus de corticoïdes n=4, immunosuppresseurs n=9). Au moins une rechute était constatée dans 63 % des cas lors de la dégression du traitement dans 75 % des cas. Le délai moyen d’hospitalisation était de 39jours. Le diabète cortico-induit était la complication iatrogène la plus fréquente (n=9), suivi par l’HTA (n=4) l’hypocalcémie (n=3) et la déshydratation (n=2). Quatre patients décédaient (taux de mortalité 11,7 %) dans un délai moyen de 4,7jours d’hospitalisation en raison d’un choc septique dans un cas et d’une hypovolémie dans un autre cas.

On dispose de peu de connaissance concernant le pemphigus du sujet âgé. En Tunisie, une seule étude menée au centre du pays concluait à une prédominance des formes vulgaires avec une répartition proche entre les deux sexes ce qui tend à rejoindre le profil épidémio-clinique décrit en Europe et aux États-Unis. Notre série rejoint cette étude en terme de sex-ratio mais se distingue par la fréquence importante des formes superficielles souvent étendues et de cicatrisation lente. La corticorésistance et les rechutes étaient fréquentes. Le pronostic est conditionné par les complications iatrogènes.

Le pemphigus du sujet âgé est grave avec un taux de mortalité élevé, sa prise en charge est difficile du fait des formes souvent étendues d’emblée, la cicatrisation lente, les rechutes fréquentes et les complications iatrogènes fatales.